Une femme merveilleuse vient de nous quitter: Francine Tissot est décédée à Paris le mercredi 7 Décembre 2011. Dotée d’une grande curiosité d’esprit, intrépide, l’esprit toujours en éveil, excellente photographe, elle entreprit son premier voyage en Asie en 1963 avec des amis, Guy Thomas et Jacques Biltgen, chargés d’un reportage « Aux sources de l’Indus » pour Connaissance du Monde, Ce voyage la conduisit au Swat et jusqu’à Gilgit.
Fascinée par l’art du Gandhāra, elle s’inscrivit à son retour à l’Ecole du Louvre où elle suivit les cours de Jeannine Auboyer. Son mémoire de l’Ecole du Louvre « Gandhāra » fut publié en 1985 dans la collection « Vie publique et privée dans l’Inde ancienne ». Nommée chargée de mission en 1970 au département Gandhāra-Afghanistan du Musée Guimet, c’est-Ã -dire de fait conservateur bénévole non rémunéré, elle entreprit de rassembler, classer et étudier les collections de ce domaine. Beaucoup de pièces provenant des fouilles antérieures à 1939 de la DAFA étaient alors simplement déposées dans la « triangulaire » (l’immense réserve du sous-sol) et recouvertes d’une épaisse poussière grise. A partir de l’automne 1976, j’aidais Francine dans cette tāche, qui permit plus tard la reconstitution des stupas trouvés par Barthoux à Hadda actuellement exposés au premier étage du Musée Guimet.
En 1976 elle participa très activement à l’exposition du Grand Palais « La Route de la Soie » dont Gilles Béguin était le commissaire. Elle écrivit de nombreux articles tout en enseignant à l’Ecole du Louvre à partir 1984. De cet enseignement résultent sa participation à la « Bibliographie analytique des ouvrages parus sur l’art du Gandhāra : entre 1950 et 1993 » (P. Guenée, F. Tissot, P. Callieri, P. Bernard, Paris : Institut de France, 1998) et son livre « Les arts anciens du Pakistan et de l’Afghanistan » (Paris : Desclée de Brouwer, 1987).
Bouleversée par le drame du Musée de Kaboul, elle entreprit un travail titanesque , le « Catalogue of the National Museum of Afghanistan- 1931-1985 », rédigé en français, qu’elle dut traduire en anglais à la demande de l’Unesco qui le publia en 2006, à la veille de ses quatre vingt dix ans .
Elle aida de nombreux chercheurs français et étrangers dans leurs recherches, les hébergeant bien souvent. Elle enrichit la photothèque de Guimet de centaines de clichés pris lors de ses voyages.
Pendant trente ans, elle n’a cessé de parcourir l’Afghanistan, le Pakistan et l’Inde. Elle visita Dunhuang en Septembre 1981, fut invitée au Japon où elle fit un long séjour. Son dernier grand voyage date de Septembre 1998 : elle participa au séminaire international sur « le Début de l’Art Bouddique: Gandhāra et au delà (Asie Centrale, Gandhāra, Inde et Sri Lanka) » organisé au Sri Lanka par Osmund Bopearachchi.
Le Musée Guimet lui doit beaucoup, ses collègues et ses nombreux amis aussi. Nous ne l’oublierons pas.
Laure Feugère