Conférence par Tristan Mauffrey (Université Sorbonne Nouvelle Paris 3).
Lundi 13 mars 2023, 18h30-20h en salle 4.05 à l’Inalco (65, rue des Grands Moulins, 75013 Paris).
Lorsqu’elle publie en 1931 La Vie surhumaine de Guésar de Ling, le héros thibétain, racontée par les bardes de son pays, Alexandra David-Néel explicite sa démarche : elle veut donner à lire au public francophone (puis anglophone) une « traduction condensée » de l’épopée de Gesar dans le but de conférer une légitimité nouvelle à cet objet culturel largement insaisissable, en le plaçant au côté des chefs-d’œuvre de la littérature mondiale. On peut parler, en ce sens, de la création d’un artefact littéraire, produit d’un travail de collecte et de comparaison de manuscrits, de notation de performances orales, et de réécriture. Pour saisir cette tradition poétique mouvante et (se) la rendre lisible, la voyageuse et orientaliste a recours dès ses écrits de 1922 à des références conceptuelles et littéraires qui sont principalement empruntées à la tradition critique issue de l’hellénisme, et en particulier au modèle de l’épopée homérique. Rien de surprenant à cela, bien sûr, tant la littérature grecque est une référence centrale dans la culture européenne de son temps, et apte à jouer un rôle de paradigme. Mais rien non plus qui nous dispense d’en faire l’examen critique, pour mieux évaluer la manière dont cette opération de transfert culturel est conçue et menée, avec des effets encore sensibles sur les discours aujourd’hui associés à la tradition poétique de Gesar.
Comme permet aussi de le voir la récente publication de son inédit consacré à Milarépa, Alexandra David-Néel a recours aux références grecques non seulement parce qu’elles sont censées être beaucoup plus familières à son lectorat, mais aussi parce qu’elles constituent un prisme théorique à travers lequel elle appréhende la culture lettrée et les pratiques poétiques vivantes du Tibet. On se propose donc d’aborder ces usages de l’hellénisme, dans une perspective comparatiste, à partir des textes qui accompagnent les écrits que la voyageuse consacre à la figure de Gesar et qui tendent à faire de ce dernier un héros de la littérature mondiale.
Comme permet aussi de le voir la récente publication de son inédit consacré à Milarépa, Alexandra David-Néel a recours aux références grecques non seulement parce qu’elles sont censées être beaucoup plus familières à son lectorat, mais aussi parce qu’elles constituent un prisme théorique à travers lequel elle appréhende la culture lettrée et les pratiques poétiques vivantes du Tibet. On se propose donc d’aborder ces usages de l’hellénisme, dans une perspective comparatiste, à partir des textes qui accompagnent les écrits que la voyageuse consacre à la figure de Gesar et qui tendent à faire de ce dernier un héros de la littérature mondiale.