Mardi 24 février 2015 :
Pustak Ghimire, post-doctorant attaché au Centre d’études himalayennes, UPR 299, CNRS, Villejuif.
(doctorat EHESS 2010, post-doctorat au CNRS en 2011-2012, post-doctorat à l’Université d’Oxford en 2013)
La possession de femmes par la déesse Bhagavati dans les villages des Moyennes Montagnes du Népal oriental est apparue au milieu des années 90. Le phénomène a pris naissance dans les populations himalayennes autochtones, Kirati et Magar, puis s’est étendu aux basses castes hindouistes, alors que se développait l’insurrection maoïste.
Ces élues par la divinité cultivent un pouvoir de clairvoyance et de guérison qu’elles mettent au service de leurs dévots et de nombreux curieux. En s’astreignant à un mode de vie ascétique, les possédées cherchent à maintenir la grâce de la déesse et à acquérir une reconnaissance sociale et une autorité que la société locale ne leur reconnaît pas spontanément. Le culte fonctionne comme un réseau flexible, porté au prosélytisme. Il se heurte aux sarcasmes des sceptiques et des misogynes.
Le phénomène doit s’interpréter dans le contexte des mutations qui affectent la région : familles ébranlées par l’émigration des hommes, violences faites aux femmes, délitement du pouvoir des notables, divisions locales exacerbées par la politisation et l’insurrection maoïste, mise en cause de la hiérarchie des castes …
La présence incarnée de Bhagavati, divinité puissante et compatissante, répond aux nouveaux besoins spirituels d’une fraction de la population.