The First International Hub of “Tibetan Studies”: Ghoom Monastery and its Founder Sherab Gyatso (1821-1902)

« Le premier pôle international d’études tibétaines : le monastère de Ghoom et son fondateur, Sherab Gyatso (1821-1902) ».

Conférence en Anglais par Berthe Jansen (Université de Leyde), à 17H30 à la Maison de l’Asie, 22 avenue du président Wilson, 75016 PARIS.

Le 11 juillet 1892, une grande procession sillonna les ruelles de Darjeeling. Une foule nombreuse se rassembla pour recevoir les bénédictions des reliques bouddhistes arrivées du Sri Lanka. Parmi les participants figuraient Anagārika Dharmapāla (1864-1933), des membres de la famille royale du Sikkim, des théosophes occidentaux, des abbés de monastères locaux et l’érudit bengali Sarat Chandra Das. Sherab Gyatso (shes rab rgya mtsho), moine mongol, fondateur et abbé du monastère de Yiga Chöling (yid dga’ chos gling), communément appelé monastère de Ghoom, porta le cercueil contenant les reliques. La procession se termina à la résidence du Raja du Sikkim, où des bouddhistes cinghalais et tibétains prononcèrent des discours. Sherab Gyatso, alors âgé de 71 ans, parlait tibétain et a parlé de l’histoire du bouddhisme et de la façon dont il s’est répandu de l’Inde au Tibet et au Sri Lanka.
Les spécialistes de la langue tibétaine reconnaissent ce moine mongol pour son rôle crucial dans la production de l’un des dictionnaires les plus durables de la discipline, édité par Sarat Chandra Das (1902). Les historiens qui étudient les relations du Tibet avec le Raj britannique le connaissent peut-être comme informateur britannique et instructeur de tibétain auprès d’agents opérant sur les territoires tibétains. Pourtant, la procession pan bouddhique au cours de laquelle Sherab Gyatso a joué un rôle si important – dont Henrietta Müller, éminente théosophe et défenseure des droits des femmes, a témoigné et documenté – le présente sous un jour différent, celui d’un moine engagé dans la construction de ponts entre les communautés bouddhistes et la diffusion du Dharma. En travaillant sur mon projet financé par l’ERC « Locating Literature, Lived Religion, and Lives in the Himalayas: The Van Manen Collection », j’ai découvert une courte autobiographie de ce personnage aux multiples facettes dans les archives de Leyde. Ce texte est le seul écrit connu de Sherab Gyatso en tibétain. Dans cet exposé, j’analyse le contenu de cette autobiographie à la lumière des relations du lama avec ses coreligionnaires bouddhistes, les missionnaires, les fonctionnaires britanniques et la population diversifiée de Darjeeling. Plus important encore, je présente le monastère Gelug qu’il aurait fondé en 1875 comme une zone de contact culturel où des personnes de diverses origines religieuses et ethniques étudiaient la langue tibétaine et le bouddhisme. Je soutiens que le monastère Ghoom a été la première institution bouddhiste tibétaine véritablement internationale, rendant son histoire et sa contribution aux études tibétaines et bouddhiques dignes d’une plus grande attention de la part des chercheurs et du public.